Critiques du CD Musique Suisse du XXème Siècle

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Quotidien La Presse/Riviera Chablais, octobre 1997

Quatre suisses de ce siècle

Sous le titre "Musique suisse du XXe siècle", le pianiste Lorris Sevhonkian offre un florilège où l'originalité du choix le dispute à la qualité d'inspiration et d'interprétation. Quatre compositeurs, deux célèbres, Schoeck, Martin, voisinent avec la fertilité d'invention d'un D'Alessandro et d'un Oberson.
L'écoute de ces oeuvres permet de se faire une idée précise d'un vaste domaine musical, celui de la musique suisse contemporaine pour piano. Lorris Sevhonkian interprète ces pages avec tous ses moyens, fort nombreux, en particulier son toucher admirable.

Robert Genton

Revue musicale de suisse romande, décembre 1997

Musique suisse du XXe siècle

Les Préludes de Frank Martin sont avec les deux pièces de Schoeck les "classiques" de la musique suisse pour piano. On aimerait en dire autant de ceux que Raffaele d'Alessandro a rassemblés en un cycle de proportion analogue au modèle chopinien : ensemble superbe et superbement pianistique, dont on entend parfois quelques morceaux isolés mais qui forme un tout comme le prouve l'enchaînement des tonalités. Lorris Sevhonkian en offre ici la première gravure intégrale, et a tout loisir d'y déployer sa brillante technique et son remarquable talent d'interprète. Comme aussi chez Frank Martin il sait créer l'ambiance appropriée à chaque page, grâce à la finesse et à la sensibilité de son toucher jointe à une riche palette sonore. si ces trois auteurs conservent d'évidentes attaches avec le "pianisme" romantique, René Oberson adopte quant à lui une esthétique plus novatrice dans Roumious, grand morceau où une citation du Veni creator sert à évoquer une vision cosmique en une juxtaposition kaléidoscopique de figures contrastées. Au total un disque excellent à tous égard, y compris sous l'angle de la prise de son et de la notice, rédigée par l'interprète lui-même.

Quotidien 24 heures, 9 janvier 1998

Lorris Sevhonkian honore les compositeurs suisses

Avec son disque 'Musique suisse du XXe siècle', le pianiste publie une compilation insolite.

Lorris Sevhonkian est un pianiste qui n'a pas froid aux yeux. Depuis une dizaine d'années, il se construit une carrière encore discrète, mais qui dénote un tempérament très original. Parallèlement à son activité très appréciée de concertiste en Romandie, il se fait remarquer en 1995 avec son deuxième disque en enregistrant pour la petite marque allemande Ambitus une version somptueuse de la Sonate en si mineur de Liszt. Le pari réussi était pourtant risqué face à la difficulté de la pièce, mais aussi à la profusion de versions déjà enregistrées par les plus grands interprètes.

En s'attaquant à des monuments du répertoire ou au contraire en défrichant hors des sentiers battus, Lorris Sevhonkian semble se lancer à chaque nouveau disque un nouveau défi. Il en a fait paraître simultanément deux d'excellente facture en 1997. Le premier est consacré aux célèbres tableaux d'une exposition de Moussorgsky, dont il livre une version enivrante et forte.

En complément, l'oeuvre de Borodine : quelques piécettes secrètes et rares qu'on ne joue jamais. Le deuxième disque est encore plus étonnant. Intitulé 'Musique suisse du XXe siècle', il forme une compilation inhabituelle d'oeuvres de quatre compositeurs de notre siècle, les vingt-quatre préludes de Raffaele d'Alessandro sont enregistrés pour la première fois (cinquante-sept ans après leur composition!), formant un cycle passionné et passionnant, et Roumious de René Oberson est une création composée spécialement pour ce disque. Si les huit préludes de Frank Martin ou Consolation et Toccata d'Othmar Schoeck sont mieux connus. ils se muent sous les doigts de Sevhonkian en autant de bijoux sonores aux reflets sombres. Cette entreprise courageuse est conduite avec un goût musical très sûr, une grande aisance technique, sublimée par une prise de son vraiment remarquable qui n'a bénéficié d'aucune retouche.

Matthieu Chenal

Quotidien La Liberté, 29 mai 1998

Sevhonkian joue René Oberson

A la suite d'un très beau disque consacré à l'oeuvre de piano de Liszt en 1995, Lorris Sevhonkian présente coup sur coup deux remarquables gravures consacrées aux musiciens suisses du XXe siècle, ainsi qu'aux compositeurs russes du XIXe siècle. Concernant le premier, les Tableaux d'une exposition de Moussorgsky quelques versions font date : surtout celle de Brendel ou Beroff. A celle-ci on ajoute volontiers celle de Lorris Sevhonkian. Sa vision de l'oeuvre est claire, sans emphase, expressive, transmettant toute l'essence du langage du compositeur. S'achevant par la délicieuse Petite Suite (1885) de Borodine, animée d'un jeu tout de poésie, ce disque sera retenu par la discographie.

Sur sa deuxième gravure, Lorris Sevhonkian ne craint pas les inédits. Ses vingt-quatre Préludes opus 30 (1940) de Raffaele d'Alessandro (1911-1959), premier enregistrement intégral, montre un compositeur formé aux grandes écoles du piano qui, pourtant, sait écrire une musique originale aux climats très contrastés. Dans la Consolation opus 29 d'Othmar Schoeck, la sensibilité du toucher ainsi que l'âme musicienne de Lorris Sevhonkian font merveille dans l'essence romantique du thème, et la Toccata est interprétée dans une virtuosité éblouissante, Enfin, après les huit Préludes (1948) de Frank Martin, aux climats douloureux, souffle sur le clavier un air mystérieux avec la pièce Roumious (de l'occitan qui signifie 'les Pèlerins de l'amour') de René Oberson. En un long récitatif, le langage est à la recherche d'un ciel, assemblant plusieurs thèmes, sur des motifs rythmiques particulièrement audacieux, ou des accords aux riches harmonies pour se conclure dans des climats éthérés d'une grande délicatesse. Une belle partition, mais singulière, voire déroutante, du compositeurs fribourgeois, qui clôt le deuxième disque d'un pianiste doté d'un grand talent.

Bernard Sansonnens

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